Binance arrête ses contrats Futures en France

A compter du 2 août 2022, les utilisateurs français de la plateforme d’échanges Binance ne pourront plus avoir accès à certains produits, comme le fameux « Futures ».

Un produit future est un contrat à terme représentant un achat ou une vente à un prix fixé, mais une livraison du sous-jacent à une date différée. Dit autrement, lorsque j’achète ce produit, je n’achète pas directement un bitcoin mais le droit futur à me faire livrer un bitcoin, son prix ayant déjà été payé.

En finance traditionnelle, c’est un outil efficace qui permet au trader de limiter son exposition au risque d’une position, particulièrement en investissant via un future sur la position opposée. Ainsi, si je spécule à la hausse sur le cours du pétrole, je peux avoir un intérêt à prendre une position à la baisse via un future, pour limiter ma perte s’il s’avère que le cours du pétrole n’augmente pas.

En ce qui concerne Binance, son produit futures pose une difficulté supplémentaire : il est perpétuel. Ainsi, la livraison du sous-jacent n’aura jamais lieu, le contrat n’expirant pas et n’ayant, en conséquence, pas de terme (ce qui, à soi seul, pose une difficulté en droit français pour le qualifier de « contrat »1).

Partant, en réalité, lorsque je réalise des opérations sur ce produit, j’achète et je vends un « contrat » répliquant le cours du bitcoin mais je ne détiendrai jamais le sous-jacent, le bitcoin.

L’intérêt pour les investisseurs ne se trouve pas tant dans le produit, mais dans ce qu’il offre comme possibilités : investir avec un effet de levier.

Il s’agit-là d’opérations financières sophistiquées, et donc risquées, qu’il convient de parfaitement comprendre avant d’initier.

C’est sans doute pour ces raisons que Binance, dans le cadre de son enregistrement en tant que prestataire de services sur actifs numériques, préfère mettre fin à son offre sur ce type de produits.

Parce que de nombreux investisseurs ont réalisé des gains conséquents sur ce produit (qui, rappelons-le, permet in fine de parier sur la hausse du bitcoin mais également sur sa baisse), et continueront probablement via d’autres plateformes, une clarification s’impose.

L’article 150 VH bis du code général des impôts, organisant les modalités d’imposition des plus-values réalisées par des particuliers à l’occasion de la cession d’actifs numériques (i.e. la fameuse « flat tax crypto »), n’apparait pas applicable aux gains réalisés sur les produits futures.

En effet, les actifs numériques sont définis, notamment, par exclusion des jetons remplissant les caractéristiques des « contrats financiers »2.

Par conséquent, si les produits futures sont des contrats financiers, c’est qu’ils ne sont pas des actifs numériques et donc, que l’article 150 VH bis du code général des impôts ne leur est pas applicable.

Les contrats financiers sont listés à l’article D 211-1 A du code monétaire et financier, et regroupés sous l’appellation « instruments financiers à terme ». Cet article, en adoptant une rédaction très large, couvre les produits futures existants en finance traditionnelle.

Par analogie, il serait donc possible de qualifier le produit de Binance de future au sens traditionnel. Seul bémol : le produit de Binance ne comporte pas de terme. Il ne répond donc pas au stricto sensu à l’approche du code monétaire et financier, et n’est probablement pas un contrat au sens juridique du terme.

S’il peut donc exister un doute sur la qualification du produit, et les conséquences fiscales qui en découlent, le bon conseil commande de traiter ces sujets avec prudence, tant l’administration pourrait aisément soutenir que l’article 150 VH bis du code général des impôts n’est pas applicable aux gains réalisés sur ce produit.

Evidemment, comme toujours en matière fiscale, le contribuable conservera la possibilité de soutenir une analyse différente de celle de l’administration.

En cas de désaccord, il appartiendra au juge de l’impôt de trancher le litige.

Gageons que ce dernier n’a pas fini de se faire des cheveux blancs sur la qualification juridique des opérations portant sur des crypto-actifs !

1 Article 1210 du code civil.

2 Article L 54-10-1 du code monétaire et financier.

Cet article est initialement paru en juin 2022 sur Linkedin. Nous le reproduisons ici avec l’aimable autorisation de son auteur Thomas SCHAUBER avocat spécialisé dans le droit des affaire et la fiscalité (incluant celle des crypto-actifs) .

Author: Justin

20 ans d'expérience dans l'entreprenariat, l'innovation technologique la rédaction et la mise en forme de contenu à valeur ajoutée (articles, rapports, dossiers, infographies). Je suis spécialiste du minage de données sur internet depuis 1996. Sujets de prédilections: Web1, 2 et 3, Intelligence artificielle, robotique, interfaces hommes/machines, bio-hacking, S.F., astrophysique, informatique quantique, Steampunk.

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